Chorégraphe et danseuse, Julie Botet commence son parcours à La Manufacture Vendetta Mathea avant d’intégrer en 2012 l’école du CCN de Roubaix Carolyn Carlson puis Olivier Dubois. Parallèlement, elle obtient en 2015 une licence en Art-Danse à l’Université Lille 3. Elle intègre en 2016 la formation CobosMika Seed’s en Catalogne où elle fait la rencontre de nombreux chorégraphes catalans et européens. C’est en cette même terre catalane qu’elle s’initie à la vidéo-danse en intégrant le collectif Palamos Hospital au sein duquel elle crée NEUS, KISS KISS, NANA. Trois vidéo-performances féministe autour des représentations du corps féminin au sein de la société et du processus d'empuissancement par le corps. En 2016 toujours, Julie intègre Les Sapharides qu’elle codirige désormais avec Mel Favre. Elles signent ensemble trois pièces chorégraphiques, Dolores (2019), PUCIE (2020) et Jumelles (2022).
Julie travaille également en tant qu’interprète ou assistante chorégraphique pour La Ruse (Bérénice Legrand), la Cie l’Impatiente (Théo Borne et Antoine Domingos), pour La Cie l’Escamoteuse (Pauline Fontaine) et ponctuellement avec La lune qui gronde (Muriel Coquet) ou Le collectif Lacavale. Depuis juin 2019, Julie initie son premier projet solo, Bébé, sous le nom de Yonsk, en collaboration avec Nicolas Tarridec (création sonore), Maxime Gomard (regard extérieur). Julie se forme également depuis deux ans comme danse-thérapeute pour les personnes atteintes de la maladie de Parkinson.
Projet
Bébé
Bébé c'est le nom d'une créature à mi-chemin entre la vie et la mort, une sorte de déesse-paysanne venue témoigner de l’endroit indéfini dans lequel elle se trouve. Une question face à la bienséance funéraire de nos sociétés occidentales qui censurent les endeuillé·es et véhiculent une image édulcorée de ce qu’est « mourir ». S’enchevêtrent ainsi des bribes de récits de vie intime, dans lesquels la danseuse réinvente ses rites oubliés. Quelle est cette fin, cette mort que nous regardons tous·tes de loin, sans vraiment faire deuil, parole ni désordre ?
Bébé prend racine en avril 2016 à Séville lors d’une rencontre/résidence avec la chercheuse et chorégraphe flamenca Alba Lucera. En 2019, la disparition soudaine d’une des vieilles d-âmes de la vie de Julie déclenche la nécessité de faire germer et grandir cette création qui devient dès lors un hommage. Elle fait alors appel à Max Gomard en tant que regard chorégraphique et Nicolas Tarridec en tant que créateur sonore, parfait complices pour arroser cette bouture artistique. La mort, la notion du « plus jamais » est notre lot / fardeau à tous·tes, elle est crainte et répulsion pour certain·es, fascination pour d’autres. Le point de départ de cet objet chorégraphique provient du Journal Intime de Frida Kahlo, dans lequel la peintre écrit : « Yo soy la desintegración ». Yonsk s'est donc d’abord intéressée au processus de désagrégation, de dissolution, de destruction. Imaginer un corps comme matière solide et concrète qui, par la vie, par le mouvement, s’effile, s’épluche, perd en contenance et en densité. L'idée était de mettre en danse la désintégration, comme métaphore de la vie vers la mort, de la mettre en jeu pour nous réconcilier avec notre mortalité. Entre sarcasme et soulèvement, le solo Bébé aborde les sujets délicats de la mort, de la mémoire, des hommages et notre rapport aux rites funéraires. Ce spectacle pointe aussi du doigt la bienséance funéraire inhérente à nos sociétés de marbre, qui censurent les endeuillé·es, en véhiculant une image édulcorée de la mort. C’est une prise de parole qui s’érige contre l’hypocrisie mercantile existante autour des funérailles, qui, selon l'artiste condamne tout élan spirituel véritable. Au cours de cette recherche, Yonsk convoque plusieurs personnages, réalistes ou chimériques, qui représentent chacun·e une manière différente de faire face au deuil. Ces personnages évolueront dans une scénographie composée d’éléments organiques, terre, fleurs, cendres etc. Le public sera invité à s’installer en salle ou sur le plateau, sur lequel deux rangées de sièges se feront face selon un dispositif bifrontal, à l'image de la table familiale, espace de déambulation - en partie - pour l’interprète. Nicolas Tarridec dans la recherche sonore et la diffusion de musique live permettra de densifier cette recherche de rites, entre tradition et contemporanéité, notamment grâce à l’utilisation du corps et des rythmes flamenco comme instrument de musique. Bébé met en regard une prise de parole collective et grinçante envers la mort, et une prise de parole intime et purgative autour d’une mort symbolique. « La mort » est l'état irréversible d'un organisme biologique ayant cessé de vivre, mais existent aussi « les petites morts », qui opèrent toute au long de la vie, lorsqu’une manière d’être se décompose tandis qu’une nouvelle n’a pas encore émergé. S’enchevêtrent alors des bribes de récits de vie intimes, dans lesquels l'artiste questionne les rites, cherche ses rites pour célébrer l’avant, célébrer l’enfant qu'elle a été, obsédée par la mort et l’absence de sens des funérailles.